Comme ici en Espagen lors d'un match de jeunes, les incidents dus aux spectateurs sont de plus en plus nombreux.

En sept ans, les incidents commis par des spectateurs ont été multipliés par trois sur les terrains de football amateur. Notre rédaction fait le point sur ce phénomène.

Dimanche dernier, Yacine Foughalia, éducateur des moins de 17 ans de l’ES Seizième (Paris) a été grièvement blessé au bras lors d’une bagarre générale qui a éclaté durant la rencontre opposant son club à l’Ararat Issy. Opéré de l’avant-bras lundi, il a eu douze points de suture et s’est vu prescrire dix jours d’Incapacité Temporaire de Travail (ITT). Comme le rapporte Le Parisien, le climat était délétère pendant le match. Et tout a dégénéré à quinze minutes de la fin quand l’ES Seizième a égalisé. Les spectateurs ont alors envahi le terrain et une violente bagarre générale a éclaté.

La hausse des incidents dus aux supporters sur les sept dernières saisons.

Insultes, agressions, envahissements de terrain… les spectateurs sont de plus en plus violents dans le football amateur. D’après l’observatoire des violences de la Fédération Française de Football, le nombre d’incidents du aux spectateurs est en constante hausse puisqu’il a triplé sur les six dernières années (voir graphique ci-contre). « C’est devenu un vrai problème, comme on le voit dans les différentes commissions de discipline » relevait d’ailleurs Alain Martin, président du District de Loire-Atlantique, le plus important de France, en début d’année 2017.

Si les agressions physiques restent assez marginales, ce sont surtout les agressions verbales qui ont pris de l’ampleur. Et les instances sont de plus en plus sévères à l’encontre des clubs, surtout lorsque les arbitres rapportent avoir été insultés comme ce fut le cas à Saint-Malo – deux matchs de suspension avec sursis après un match de D2 féminine – ou encore pour les clubs de La Mellinet et Bellevue à Nantes où pas mois de dix personnes ont été suspendues trois mois en première instance pour ne pas avoir donné le nom d’un spectateur qui avait insulté les arbitres.

De nombreux actes racistes passés sous silence

« C’est un vrai problème sur des terrains qui sont ouverts au public, explique Anthony Faria, vice-président de l’Etoile du Cens, à Nantes, dont le terrain a été suspendu à la suite du débordement de (pseudos) supporters. Par exemple, on ne peut empêcher des jeunes de rentrer en scooter autour du stade ou de gérer le flux des spectateurs. C’est un sujet dont on doit discuter avec la municipalité. » Si les pouvoirs publics doivent prendre en compte ce problème des incidents dus aux spectateurs, les instances du football ne doivent pas l’ignorer. « Les clubs ont besoin d’être accompagnés plutôt que d’être sanctionnés, souligne un ancien président de club, qui a jeté l’éponge depuis quelques mois. Ce n’est pas en mettant des amendes ou des suspensions que les problèmes seront réglés. Il faut vraiment que tout le monde travaille ensemble. »

Un autre problème de comportement est en nette accentuation : le racisme. Car si les arbitres n’hésitent pas à faire un rapport lorsqu’ils sont insultés, ils sont moins enclin à signaler les propos racistes entendus au bord des terrains. « J’ai entendu de nombreuses insultes racistes depuis le début de saison, notamment sur mes joueurs d’origine africaine, explique un entraîneur breton. C’est très compliqué de leur expliquer qu’ils doivent garder leur calme, surtout quand l’arbitre nous dit qu’il ne pourra rien faire. » En consultant de nombreux procès-verbaux de discipline, de Ligues ou District, rares sont d’ailleurs les suspensions pour propos racistes. Pire, la plupart des actes de ce type traités par les instances ne sont sanctionnés que par des amendes.

« Il faut accentuer la prévention, la sensibilisation car c’est toujours mieux que ne rien faire du tout, estime un arbitre. Cela ne concerne pas forcément que l’arbitrage mais tous les acteurs du football. Et peut-être qu’il faut aussi plus souvent mettre en avant les bonnes actions des clubs que les sanctions qui sont prises. » Le sujet est tout de même inquiétant car au rythme des incidents qui se sont déroulés ces dernières semaines, un drame pourrait très bien arriver rapidement.

Jérome Bouchacourt