Si l’arrêt de matchs de Ligue 1 et Ligue 2 pour propos discriminatoires fait le buzz, c’est déjà le cas depuis quelques années dans le football amateur.

Depuis le début du mois d’août, plusieurs matchs de Ligue 1 et Ligue 2 ont été arrêtés quelques minutes pour des propos ou des bannières discriminatoires. Des décisions du corps arbitral qui ont été largement médiatisées, notamment par Roxana Maracineanu, la Ministre des Sports, ou encore Marlène Schiappa, la Secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.

Mais cette décision d’arrêter des matchs a déjà lieu depuis plusieurs saisons dans le football amateur. Le 8 avril 2018, un arbitre avait arrêté une rencontre de Régional 3 à la suite des propos racistes d’un spectateur envers un joueur adverse. Et il avait fait évacuer le stade afin de poursuivre les débats dans la sérénité. « C’était une décision très courageuse, nous expliquait à l’époque un témoin des faitsQuand nos dirigeants ont demandé au public de sortir, ça s’est bien passé. »

Les arbitres féminines, une vraie cible

Arrêter un match pour des propos discriminatoires – et pas seulement homophobes – n’est donc pas une nouveauté. « Aujourd’hui, il faut se rendre compte qu’on est sur des choses bien plus violentes dans le football amateur, souligne Damien Groiselle, président de l’UNAF Paris Île-de-France. J’ai déjà arrêté des matchs quelques minutes car il y avait des propos discriminatoires. »

Les arbitres féminines sont d’ailleurs une des cibles privilégiées. « Viens me s….. après le match », « Tu sais que tu es trop bonne »« Et si tu venais prendre ta douche avec nous » … Tout cela est du vécu. Les instances du football amateur n’ont donc pas pour l’instant pris de mesures particulières puisque l’arsenal réglementaire existe. « C’est à chaque arbitre de prendre sa décision selon les circonstances car il sait qu’il a cet outil à sa disposition » précise Damien Groiselle.

Ancien arbitre assistant de Ligue 1, Sébastien Denis est sur la même longueur d’onde. « Nous ne donnerons pas de consignes particulières, si ce n’est de continuer à arbitrer en toute bonne foi, indique le Conseiller Technique Régional de l’Arbitrage CTRA) de la Ligue des Pays de la Loire. L’antécédent qu’on a eu sur le stade de Blain (voir plus haut, N.D.L.R.) n’a fait que rappeler le bon sens. » Dans le Grand est, il n’y aura pas de consignes non plus puisque le CTRA Mathieu Lombard nous a confié « attendre que la Ligue se positionne car ça ne peut être qu’une volonté des instances ».

Ne pas oublier les autres discriminations !

Ce qui est clairement le cas dans le football professionnel. « Tout cela a plus un sens politique mais il faut faire attention car ça peut avoir l’effet inverse, concède un arbitre qui officie chez les pros. Le dialogue aurait dû être instauré en amont avec les supporters. Mais il faut aussi savoir quels termes sont qualifiés d’homophobe car tout n’est pas très clair. »

Ancien arbitre international, Saïd Ennjimi a été la victime des mêmes chants qu’on entend régulièrement. « J’ai entendu des Ennjimi va te faire enc….., explique le président de la Ligue de Nouvelle-Aquitaine. Ça faisait partie du folklore. Mais c’est intéressant que les institutions disent stop à ce genre de comportement. Ce qui a changé, c’est de la façon dont on le regarde. Ensuite, c’est très difficile de trancher, de décider. Le geste de la LFP de rencontrer les associations de supporters est une bonne chose. »

Et surtout, il ne faut pas que toute cette médiatisation sur les supporters de Ligue 1 et Ligue 2 occulte les autres discriminations qui sont aussi un combat à mener, et notamment dans le football amateur.

Jérome Bouchacourt